ROMANIAN SHORTS #01

Sous-titres: EN Sortie:
Langue: Romanian Pays:
Romania

Sélection et présentation par Dominique Nasta, professeure à l’ULB et auteure de l’ouvrage “Contemporary Romanian Cinema: The History of an Unexpected Miracle” (2014)

Au début du 21ème siècle, le cinéma roumain devient de plus en plus visible aux yeux de la critique et du public dans les festivals par le biais d’un sous-genre jusque là négligé, celui du court métrage. Les courts métrages roumains, pour la plupart des fictions présentées par des nouveaux venus comme travaux de fin d’études, ou en tant que projets totalement indépendants, obtiennent de nombreux prix, à la fois dans un grand nombre de festivals en Europe ou aux Etats-Unis. Les noms, désormais célèbres, de Cristian Mungiu, Corneliu Porumboiu ou Cristi Puiu ont d'abord attiré l'attention des professionnels du cinéma par le biais de leurs courts métrages.  Hormis le fait d'être des laboratoires efficaces pour des films plus longs et plus élaborés, ils mettent souvent en valeur la vitalité et l'originalité de talents émergents, obtenant la même reconnaissance internationale que leurs prédécesseurs.La plupart des scénarios sont très authentiques et fournissent un examen minutieux d’êtres humains ordinaires, pris dans le réseau de différents tabous sociaux. Leur vernis naturaliste vise à dépeindre les réalités contrastées sous le capitalisme sauvage, mais les films sont souvent imprégnés d'éléments absurdes, ironiques et même surréalistes, dans la meilleure veine littéraire et théâtrale roumaine. En outre, les courts métrages produits entre 2001 et 2007 sont liés par une passion commune pour le cinéma en général et pour l'appareil réflexif en particulier, étant toujours prêts à débusquer les faux-semblants, préférant les questionnements  et fuyant les évidences.

Călătorie la oraş ( Un voyage à la ville/A trip to the city, 2003, 19 ') est le film de fin d’études du réalisateur Corneliu Porumboiu. Un matin de printemps, l'instituteur du village et le chauffeur du maire se préparent à un voyage dans une ville voisine pour se procurer un ordinateur qui leur permettra d'établir une connexion Internet. On leur demande aussi d'acheter un WC dernier cri pour lequel la femme du maire a eu le coup de foudre. Une fois arrivés, ils se rendent vite compte que tout le monde sur place est occupé à célébrer le 854ème  anniversaire d'une ville sans nom…

Curcanii nu zboara (La fille au dindon/Turkey Girl) de  Cristian Mungiu est un épisode du film collectif Lost and Found (2005). Mungiu  se situe du côté du réalisme magique d’un Kusturica pour conter la visite d'une paysanne à sa mère mourante dans un hôpital de Bucarest. Il s’agit d’une métaphore ironique d’une société en transition où les pots-de-vins dominent toujours le système social. Malgré les recommandations sur la façon de gérer ce système de « graissage de patte » , la fille fera tout pour libérer son animal de compagnie. Des cendres du passé qui a vu tout un quartier du patrimoine sacrifié pour construire le palais du dictateur mégalomane, émerge un authentique petit joyau de cinéma.

Valuri (Waves, 2007, 16') d'Adrian Sitaru est probablement l'un des courts métrages roumains contemporains les plus complexes. Pendant le climax du film, le public assiste à la mystérieuse disparition d'une touriste étrangère au milieu des vagues de la mer Noire. L'atmosphère générale des scènes d'ouverture est tendue, le soleil d'été brille sans pitié et les vacanciers de toutes sortes sont serrés les uns contre les autres comme des sardines... Le son direct combine dialogue, bruits de foule, musique de divertissement, commentaires de football à la radio et conversations téléphoniques. Un tel paysage sonore apporte beaucoup d'informations sur la société roumaine à l'aube d'un nouveau siècle.

Oxygen (2010) d'Adina Pintilie est inspiré par un cas réel: un homme essaye de traverser illégalement le Danube en utilisant une bombone d’oxygène. Pendant la dictature communiste, des milliers de personnes ont risqué leur vie en tentant de fuir le pays. En fin de compte, le film se révèle être une docu-fiction poétique mêlant magnifiquement  une fiction avec d'étranges archives documentaires à l’intérieur d’images d’une beauté à couper le souffle, soutenues par un paysage sonore d’une qualité envoûtante, avec peu ou pas de dialogues.



 

Réalisation C.Porumboiu , C.Mungiu , A. Sitaru , A. Pintilie